Voyages à Muxandor, Christian Legall 2000; Pied Nu, Mickael Kleeberg 2004

Bonjour les jeunes !

Aujourd’hui je voudrais vous entretenir, non pas d’un mais de deux livres : Voyage à Muxandor de Christian Legall et de Pied Nu de Mickael Kleeberg … oui je sais, moi aussi je suis capable de promotion qui battent celles de Casto !

Mais déjà, je sens que dans les limbes ouatés et sinueux de votre pré-conscience,  là où le vice n’est qu’hypothèse et l’atavisme une condition, ce questionnement  acharné et tonitruant de ce besoin de comprendre et de savoir, cette volonté d’ordonner les choses vers un sens abscons qui point : Allemagne, quarante à,  service Mozambique. En court et pour faire bref : Pourquoi ?

Eh bien, mes jeunes sophiophiles, ces deux livres traitent d’un même sujet, c’est à dire une relation sadomasochiste gay, mais avec des approches concomitantes qui donnent pourtant des résultats diamétralement opposés. Intéressant non ?

Pied Nu raconte la découverte du SM par un quarantenaire hétéro via le minitel (oui le livre date un peu … y’a pas que Dan Brown dans la vie !). Il rencontre un maître avec qui, il va explorer la soumission avec le grand S de soumis (ou de Smiley si on n’entre pas dans le style un peu expéditif de l’auteur). Il quittera femme et enfant pour se rouler par terre et détruire son peu de personnalité.

Voyage à Muxandor se déroule dans le milieu gay. Un jeune homme découvre par annonce un maître dans le pays – imaginaire – de Muxandor. Éperdument amoureux, il subira, avec une certaine délectation tout de même, les outrages urologiques et psychologique de son maître. Il explore les dessous de la soumission avec un grand Q (parce qu’il n’y a pas que Oui Oui dans la vie).

Les deux romans commencent par le trouble du héro : fascination pour le monde SM, attirance puis dégoût, haine de soi même … Le narrateur omniscient de Pied Nu est froid, analytique, presque descriptif, tandis que celui du Voyage, identifié au personnage principal, semble plus vrai. Il analyse son désir, le met en rapport avec le monde SM gay qu’il connait, se perd en questionnement.

La première expérience est similaire pour les deux personnages : traumatisante et addictive. Puis deux quêtes se profilent : celle de la destruction de l’identité pour le héro de Pied Nu et celle, complètement opposée dans Voyage, de redécouverte de soi. Et puis de ludique, la relation prend un tour identitaire : ils s’identifient de plus en plus au rôle, deviennent des esclaves dans les faits et dans leur manière de se percevoir. Arrive le temps du mysticisme : la figure christique apparaît. Le premier héro s’identifie au Christ et le second y identifie son maître.

De ce point, les fins découlent logiquement : tragique et baroque pour Pied Nu,  triste et feutrée pour Voyage à Muxandor.

Mais finalement, les deux romans ne prônent pas qu’une vision différente de la relation sadomasochiste. A mon sens, cela va bien au delà. On trouve deux visons de ce qu’est l’homosexualité : une quête identitaire profonde et dévastatrice pour Mickael Kleeberg et une quête ludique de sexe et de raison de vivre pour Christian Legall. On peut aussi voir dans leurs rapports au Christ de compréhensions différentes du désir : désir de soi-même dans le premier roman, désir charnel de l’autre  dans le second. Une différence notoire entre les deux auteurs, Christian Legall est un danseur ouvertement homosexuel tandis que Kleeberg s’intéresse plutôt aux relations interpersonnelles (il a récemment écrit sur le Liban et sa rencontre avec Abbas Beydoun).

Du coup, le Pied Nu est plus proche du roman pour dame : fictif, romancé, loin de toutes réalités identitaires et pétri de lieux communs,  alors que le Voyage pour Muxandor semble plus authentique, plus constructif et véhicule une idée plus proche de celle que l’on retrouve dans la Culture Gay actuelle.

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6 thoughts on “Voyages à Muxandor, Christian Legall 2000; Pied Nu, Mickael Kleeberg 2004

  1. C’est bizarre, mais j’ai toujours eu le sentiment que l’homosexualité était assez dévastatrice … alors bizarrement, je suis pas hétéro, mais je me retrouve beaucoup plus dans la description de Pieds Nu … des fois, je rêve de me retrouver en tôle pour y subir plein d’sévices, … pour me détruire complètement … je sais pas d’où ça vient … (bon, j’ai déjà fait des test sur l’estime de soi et la confiance en soi … résultats : confiance en soi = normale (ni trop élevée, ni trop basse) .. et estime de soi = catastrophique … xD (6/30 mon score) …. alors j’me dis qu’ça vient ptet de ma faible estime de moi … j’ai toujours ce fantasme de me détruire complètement, d’aller à fond dans la déchéance, de me laisser complètement écrasé par les autres … ça a toujours été un peu récurrent chez moi … et je pense que c’est pour ça qu’j’ai une aversion profonde pour le deuxième type de personnage, qui voit le sado masochisme comme une quête identitaire et une envie profonde de jouir de la vie telle qu’elle est … parce que justement c’est pas mon cas … :s

    1. Je te reconnais bien là : le romantisme acharné, jusqu’au boutiste ! Je pense qu’il faudrait que tu rencontres les livres de Mishima et de Kawabata… ca devrait beaucoup te parler.
      Au delà de ca, je pense qu’il existe deux formes de masochismes : une plutot idéale et incarnée par Pied Nu, et une seconde un peu plus pragmatique qui se voit dans Muxandor.

      Sans entrer dans des détails, la réalité de la relation sado-masochiste induit des contraintes identitaires extrêmement fortes, et la quête idéale d’écrasement ou d’annihilation de son identité se heurte à des réalités psychologiques fortes (panique, survie, égo, pulsions ou frustrations sexuelle) et à des réalités temporelles aussi (lassitude, crampe, résistance à la douleur). Ajoute à cela, que dans une relation sado-maso il faut être deux. Par exemple dans Pied Nu, le maitre du héro est comme un concept : il est dominant tout le temps, il fournit l’argent, la dynamique du couple, bref il est au dela de l’humain.

      Par contre, je pense que beaucoup d’homo gars ont une inclinaison vers le masochisme idéale parce que c’est l’apanage du romantisme, de la relation amoureuse totale, complètement fusionnelle.

      Tout ca pour dire, que ce n’est pas forcément une faible estime de toi qui te conduit à t’identifier au personnage, mais plutot un idéal amoureux… lovely !

  2. ah donc c’est normal … bon ouf alors … (ouais mais j’aime bien ce côté idéal du masochisme justement … tsss chui un fucking romantique en fait … pfff et moi qui déteste les gens romantiques, j’trouvais ça mièvre, collant, noeud-noeud … et en fait, au fond, ptet que j’les envie … mais c’est vrai qu’le regard d’la société actuelle aide pas trop à assumer sa part de romantisme quand même

    alors par contre bizarrement … j’aime bien les trips uro … me faire pisser dessus et tout … j’adore … (donc ptet que j’ai le côté folle de chaillot qui est quand même là) … bon finalement chui ptet un peu des deux …. un vrai pédé bien normal quoi …… xD (fuck !!)

  3. xD ………. LOOOOOOOOOOOOOOOL je viens de piger qu’en fait, il fallait mettre ce commentaire là … sur « répondre » … mon dieu, désolé … d’habitude quand je commente tous les jours les divers blog que je lis, ça coule tout seul, mais bon … là je prends mes marques !!

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