Despicable me (Détestable moi), Coffin et Renaud, 2010 : Heimlichkeit et personnages

Bonjour les jeunes.

Affiche du film

Exit les livres xénophobes, les auteurs névrotiques et les prises de tête sur la construction identitaire, j’aimerais vous parler ici d’un film d’animation pour enfant que j’ai beaucoup, mais alors beaucoup aimé : Détestable Moi.

L’histoire en deux mots : un méchant très méchant, le plus grand des voleurs, Groo pour les intimes, se voit détrôner par le vol des grandes pyramides d’Égypte. Il décide alors de voler la Lune pour impressionner son banquier ! Mais pour réussir son plan démoniaque, il lui faut l’aide de trois petites orphelines qui vendent des biscuits au porte-à-porte.  Il décide de les adopter mais de leur cacher sa double identité et son laboratoire secret et de les faire travailler pour lui à leur insu. Oui c’est saugrenu, mais c’est marrant.

Donc évidemment on voit déjà clairement la série de quiproquos se dessiner et comment la vision candide des enfants peut influer sur la méchanceté pure. Ajoutez à tout ça des blagues de pets tordants, une démesure technologique  toute « cartoonesque » et des milliers de petits personnages jaunes qui hurlent en se jettant contre les murs en rigolant et vous obtenez un film qui vous fera rire comme quand vous aviez quatre ans ! Y’en a qui aime pas, mais laissons les à leur vie acariâtre où seule la vue de la décrépitude humaine, au journal du soir, arrive à tirer, parfois, en temps de grand vent, et quand il y a de la purée de salsifis à souper, un rictus froid et sardonique  défigurant lentement leur visage crevassé par l’aigreur, dans un grincement de porte de prison qui leur rappelle les doux moments passés sur la hanche en téflon de grand-maman lorsqu’ils étaient encore de tout jeunes adolescents et qu’elle les faisait péniblement sauter sur les restes secs de ses moignons ;  je pense qu’ils n’apprécient définitivement pas les mêmes choses que nous.

Bref, ça hurle, ça rigole, ça explose, et ça hurle encore plus fort, et ça re-explose : une heure et demie sur un rythme effréné. Cependant, si je vous triture le processus cognitif ce n’est pas pour parler moignon, mais parce que quelque chose a attiré mon attention pendant la projection.

Le point tout à fait remarquable de ce film, je trouve, est le traitement des personnages et surtout leur rapport avec le concept freudien du heimlichkeit.

1. Un petit point sur Freud : le heimlichkeit ou comment défoncer votre grand mère au scrabble

Dans un article de 1919[1], Freud intègre le concept de « unheimlichkeit » à son analyse psychanalytique. En allemand, « heimliche » est un terme relativement vaste qui couvre le sentiment de sécurité, de connu. Donc fatalement « unheimliche » veut dire le contraire, ce qui insécurise, ce qui est inconnu. Pour Ernst Jentsch, premier à avoir identifié ce concept, l’« unheimlichkeit » est une forme de peur de l’inconnu. Cependant, Freud pousse plus loin le concept, en l’étendant à des liens profonds avec la petite enfance et à la constitution de soi. Notons que le mot allemand « unheimlick » se trouve traduit en français par « inquiétante étrangeté »

On trouve donc, page 23 :

En premier lieu, si la théorie psychanalytique a raison d’affirmer que tout affect d’une émotion, de quelque nature qu’il soit, est transformé en angoisse par le refoulement, il faut que, parmi les cas d’angoisse, se rencontre un groupe dans lequel on puisse démontrer que l’angoissant est quelque chose de refoulé qui se montre à nouveau. Cette sorte d’angoisse serait justement l’inquiétante étrangeté, l’« Unheimliche », et il devient alors indifférent que celle-ci ait été à l’origine par elle-même de l’angoisse ou bien qu’elle provienne d’un autre affect. En second lieu, si telle est vraiment la nature intime de l’« Unheimliche », nous comprendrons que le langage courant fasse insensiblement passer le « Heimliche » à son contraire l’« Unheimliche » (voir 167-175), car cet « Unheimliche » n’est en réalité rien de nouveau, d’étranger, mais bien plutôt quelque chose de familier, depuis toujours, à la vie psychique, et que le processus du refoulement seul a rendu autre.

Le sentiment d’inquiétante étrangeté est donc une réminiscence qui se trouve réactivée dans le présent. Plus généralement, on peut dire qu’il s’agit d’un glissement de quelque chose « d’Heimlich » (rassurant, connu) vers quelque chose d’inquiétant.

Ce glissement, est, au cinéma, un ressort dramatique très connu, particulièrement dans le cinéma d’horreur (pensez une seconde à votre mère, zombifiée, tentant de vous dévorer la gorge, pendant que, tranquillement, vous regardez, le rire aux lèvres et la larme à l’œil, l’album de famille où les photos jaunies de vos premiers pas, succèdent aux fêtes d’école, où, sérieux et inquiet, vous déclamiez, seul en scène, devant le parterre de parents attendris et somnolents, ces vers d’une poésie abstraite que vous aviez tant de mal à retenir la succession. Effrayant non ?).  Beaucoup de films à suspens aussi reposent sur ce glissement entre connu agréable et méconnu effrayant (par exemple Open Water 2 (Horn, 2006) — où de jeunes écervelés se retrouvent coincés en plein milieu de l’océan, car ils ont bêtement oublié de descendre l’échelle avant de se baigner-  ou l’utilise comme ressort dramatique (l’Exorciste, Friedkin 1973 : les jeunes filles ne se contorsionnent pas autant en temps normal) ou encore, comme esthétique même (Erasor Head, Lynch, 1976).

La figure de inquiétante étrangeté est donc une figure qui est particulièrement efficace pour décrire le cinéma.

Cependant, j’ai l’impression que c’est exactement le sentiment inverse, celui du Heimlich, qui fonctionne à plein dans Detestable moi

2. Le « foyer » dans le Détestable Moi : ressort humoristique et dramatique.

Banquier / Boss de Dilbert (source : cheezburger.com)

Une chose qui m’a frappé en sortant de la salle de cinéma c’est que j’avais la sensation de connaitre tous les personnages.

Vector / Dumb and Dumber (Farrely, 1994)

Après une recherche sur le net à droite et à gauche voici quelques rapprochements que j’ai pu faire.

On voit donc que les personnages sont des variations de personnages mythiques déjà connus. (À gauche vous avez les personnages du film et à droite les personnages auxquels je les rapprocheaussi bien par des traits physiques des par des comportements.) Ainsi, Vector (le super méchant de l’histoire) est un looser complètement débile ce qui rappelle facilement son homologue filmique, le Docteur Nefario une sorte de monstre taciturne qui ressemble à la patronne de Monstre et Cie (Docter, 2001), le banquier un tyran sadique, Groo est une variation sur le Pingouin de Batman, etc. Les personnages du film sont donc calqués sur leurs parangons.

Agnes / B (Monster et Cie, Docter, 2001)

Les personnages évoqués, en plus de faire partie de beaucoup de médias différents (films, dessins animés, bandedessinée, etc.) sont d’époque différentes et surtout issus de cultures différentes : du coup

Cousins / Lapins Crétins

impossible que vous passiez à côté de toutes les références, au moins un personnage devrait trouver une analogie dans votre esprit, et ce quelque soit votre âge et votre milieu socioprofessionnel.

Comparatif entre Monster Inc and Despicable Me
Nefario / Roz (Monster Inc.)

On voit ici clairement que le concept de « heimliche » freudien s’applique aux personnages : ils sont issus de votremémoire (donc d’un temps où vous étiez plus jeune, à moins que vous ne parcouriez la flèche de temps de façon aléatoire, mais dans ce cas, vous ne serez plus là dans quelques heures pour me contredire) et sont utilisés comme ils le doivent (l’intégrité physique est conservée ainsi que l’intégrité de caractère). Donc les personnages sont conformes à votre souvenir (même s’il n’est que partiellement conscient) et vous place dans du connu.

Ce « Heimliche », cette proximité avec certains où la totalité des personnages aide le travail d’identification et donne aussi un sentiment d’appartenance : c’est un film que l’on s’approprie extrêmement facilement et dont les personnages sont terriblement attachants.

À ce sujet, j’ai particulièrement aimé l’idée d’un film qui ne soit axé qu’autour de méchants où de personnages à la morale fluctuante. Cela semble être plutôt à la mode depuis Kuzco (Dindal, 2000) et Schrek (Adamson, 2001) jusqu’au Megamind (McGrath, 2010, qui devrait sortir dans peu de temps) et je trouve que c’est une manière élégante de s’affranchir de la morale et du culte du héros vertueux. Peut être que c’est une idée un peu candide, mais j’ai la sensation que c’est un discours qui favorise l’empathie chez les jeunes. D’ailleurs dans Detestable Moi, on se voit que la méchanceté du héros, Groo, vient de sa petite enfance et d’une mère castratrice.

Donc, le heimlichkeit freudien comme moteur de l’identification : mettre le spectateur face à des héros connus, des comportements classiques (sans pour autant appuyer fort sur le rapprochement), mais dans des situations différentes. D’habitude, ça me fait râler, mais quand c’est fait d’une manière aussi efficace et aussi drôle, je ne peux qu’être fan et rire dans ma moustache en repensant à la tête de Groo en voyant qu’au lieu d’un pistolet à fléchette (dart gun) on lui a construit un fusil à pet (fart gun) d’une redoutable efficacité !


[1] Vous trouverez une traduction gratuite de l’article à ce lien : http://classiques.uqac.ca/…/inquietante_etrangete.html

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5 thoughts on “Despicable me (Détestable moi), Coffin et Renaud, 2010 : Heimlichkeit et personnages

  1. J’ai beaucoup aimé ce film. C’est vrai qu’il y a un sentiment de familiarité qui est omniprésent, mais on n’arrive jamais à le saisir. Hormis le personnage de « Bou » (Monstres & Cie) qui m’a sauté au visage, il ne m’était pas venu à l’esprit que tous les personnages ont une source externe au film.

    Peut-on dire ainsi que c’est une parodie ? Ou, une forme de réutilisation de personnages, un genre de version animée du caméo ?

    1. Non je ne pense pas que l’on puisse parler de parodie dans le sens où le but premier de cette réutilisation n’est pas de les tourner en dérision. Pas plus qu’un caméo parce que ce ne sont pas les personnages des autres films qui passent véritablement à l’écran.
      Mais tu soulèves un bon point, je ne suis pas sur qu’il existe véritablement de mot pour décrire ce fait là. Variation sur un thème est peut être le concept le plus proche.

      Par contre c’est quelque chose qui est assez général dans le cinéma d’animation en ce moment : que tu regardes Shrek (avec toutes les variations sur le thème des personnages que cela à amené) ou la revisite de la princesse Rapuntzel (dans le film Tangle à venir) on y voit beaucoup de personnages connus qui sont transformés en quelque chose de connexe.

  2. Bonjour,

    Je m’excuse d’avance pour ce commentaire tardif mais nous autres français n’avons eu le plaisir de découvrir ce film que cet hiver… sans compter qu’il m’a fallu deux mois pour comprendre qu’ils avaient traduit « Despicable me » en « Moi, moche et méchant » !

    Je voulais donc rebondir sur la notion d' »heimlich » esquissée dans ta critique/analyse.
    Tout d’abord, comme Carl, exceptée Boo qui m’a sautée aux yeux et peut-être les lapins crétins même un peu trop pompés, je n’avais pas réussi à mettre le doigt sur cette impression de familiarité constante. Mais, vu sous cet angle, ça devient évident.

    Si on veut mettre un terme dessus, je propose « intertextualité », ok c’est un terme de littérature un peu barbare au premier abord, mais si on le dit trois fois très vite, c’est rigolo. Et si vous êtes en manque de référence sexuelles on peut aussi aller jusqu’à la « transtextualité », c’est post-moderne, ça fait chic.

    http://books.google.com/books?id=9vc-nKRJe-YC&pg=PA131&dq#v=onepage&q&f=false

    Bon, je cesse de faire ma majorette, ce dont je voulais vraiment parler, c’est le glissement de notre chère industrie audiovisuelle vers le confort constant ou bien, oserais-je avancer : le tout-heimlich. (haha hoho)
    Finalement, la prouesse de Despicable me, c’est de réussir à nous donner l’impression qu’on est déjà en train de regarder la suite d’un film qu’on a vu l’année dernière, et ça, en ce moment, on kiffe.
    Il n’y a qu’à voir le succès des suites (Pirates des Caraïbes 4, oui, j’ai dit quatre), des prequels (argh, La Menace Fantôme), des adaptations (après tous les Marvels ils vont nous tenter Tintin (tenter tintin tenter tintin)), sans parler des séries TV.
    Si j’ai l’air amère, n’en croyiez rien : je suis la première aficionada et je serai la première à défendre la possibilité du génie et parfois de la nécessité de ces reprises.
    D’ailleurs, l’une des premières choses que je me suis dite après le film s’est qu’il appelait une suite et ce malgré une fin tout à fait fermée. Je ne sais pas si c’est par habitude, espoir, ou juste parce que j’ai trouvé un peu dommage de nous présenter trois petites filles si bien caractérisées sans vraiment s’en servir, de si bien les distinguer sans vraiment les dissocier. (Vraiment, qu’est-ce que ça aurait changé s’il n’y en avait eu qu’une plutôt que trois dans l’histoire actuelle?)

    Bref, j’ai perdu le fil de mon propre discours.
    Enfin, c’est drôle qu’en France ils aient changé le titre pour rappeler « Affreux, Sales et Méchants » (Ettore Scola, 1976), ça ne fait que rajouter des exemples à ton propos.

    Ma question donc, serait : Quand on voit le génie de ce film, est-ce vraiment un mal ou un bien, trop facile ou très bien joué, l’intertextualité à outrance ? (Ah manichéisme quand tu nous tiens…)
    Voilà un sujet de débat à l’intérieur duquel je trouve difficile de ne pas tomber dans le « j’aime/j’aime pas » et pour lequel, du coup, j’ai du mal à me détacher de mon affect.

    A vous.

    (Inside Note: Peut-être y a-t’on déjà répondu dans notre réflexion sur l’adaptation? J’ai l’impression tout de même de ne pas en avoir fait le tour, au vu de mon indécision.
    Bise à toi.)

    1. Allo Charlotte,

      La question de l’intertextualité est bonne, mais j’ai de la difficulté à l’appliquer dans le détail au cinéma car la nature même du langage cinématographique induit beaucoup de reprises, de référence et de connexions : en gros je me demande si le concept d’intertextualité à une grille adaptée à l’analyse d’une valeur de plan ou d’un type de montage. Je dois avouer que je ne suis pas très au fait de ce sujet et c’est pour cela que j’en suis resté au niveau de l’embryon d’analyse psycho.

      J’aime beaucoup le concept du « tout-heimlich », je le trouve très inspirant.
      Cependant, je me demande si cela est vraiment consubstantiel (moi aussi je sais faire la majorette) à notre époque : les séries (du feuilleton romanesque à la web série), les suites ( de la Parfaite Lumière à Pirates des Caraîbes en passant par le Nouveau Testament) ou les unités narratives (la saga des Rougon-Macquart, la comédie Humaine, L’Illiade et l’Odysée ou les Milles et Unes Nuits) existent depuis bien longtemps et je me demande si toi et moi y sommes subitement plus sensibles car nous approchons de l’âge des concepteurs actuels et que donc, nous sommes à même de saisir à plein les références et les arrimages qui parcourent les oeuvres contemporaines.
      En gros l’intertextualité serait une fenêtre fixe sur un temps (social) qui passe et nous, nous sommes en train d’y entrer puisque nous sommes en ce moment même les constituants du temps social dominant…. bref je m’égare.

      Je pense que l’intertextualité est jugée bonne lorsqu’elle est apparentée à un jeu par le spectateur (lecteur ou auditeur) : chercher la référence, saisir les arrimages, voir les connexions … bref lorsqu’on se sent (consciemment ou pas) connecté à des univers de référents culturels et qu’en plus, on devine, en filigrane, qu’on partage une forme de culture avec le ou les créateurs.
      Sensation tellement grisante qu’est celle de croire comprendre la mécanique, les références d’une oeuvre et encore plus jouissive de s’apercevoir qu’on en est la cible principale ! Il me semble que l’intertextualité vraiment réussie est celle qui te fait sentir spécial, dans le secret des Dieux, appartenant à un groupe d’initié ( cf les films de Tarantino).

      La limite, et c’est là où commence la mauvaise intertextualité selon moi, c’est lorsqu’on se rend compte que les référents intertextuels sont communs à tous, qu’ils sont trop vulgaires, trop gros, trop aisés à saisir … alors on ne sent pas/plus spécial, on croit appartenir à une masse informe et on doute qu’aucun message n’a été forgé pour nous.

      L’intertextualité doit nous faire sentir différent des autres.

      Et donc avec ces deux réponses courtes, on voit tout le paradoxe de l’utilisation mercantile de l’intertextualité : faire sentir au plus grand nombre qu’il n’en fait pas partie … et c’est dans la réussite de ce projet que peut se trouver une forme de génie

      Qu’en penses tu ?

  3. Je suis à fond pour l’idée d’être un constituant du temps social dominant ! J’aime beaucoup.

    Il me semble néanmoins que ça n’explique pas tout à fait le fait que j’ai vu le film du dimanche soir à la télé être soudain remplacé par CSI (Miami ou Manhattan)…

    S’il ne s’agit pas d’un phénomène nouveau ne serait-ce pas quelque chose de cyclique ou seulement révélateur d’une époque ou d’une humeur sociale (comme l’étaient les films « millénaristes » avant 2000) ?
    Il faudrait savoir si, par exemple, le roman-feuilleton est apparu pendant quelque chose comme la Révolution Industrielle (je n’en ai pas le moindre début d’idée) ? Il parait que l’Iliade et l’Odyssée ont été écrit durant un siècle de crise sociale importante en Grèce.

    Anyway, je suis toujours battue par mon envie inconsciente de sans cesse vouloir croire que nous vivons une époque spéciale, nouvelle ou du moins importante. L’impression que nous sommes le produit d’une génération perdue, errant sans but et sans bataille dans le néant sans fin de nos aspirations déçues ou comme le disait le grand poète Tyler Durden : « We’re the middle children of history, man. No purpose or place. We have no Great War. No Great Depression. Our great war is a spiritual war. Our great depression is our lives. » (Fight Club, David Fincher, 1999, est-il besoin de le préciser ?)… hem…
    Bref le « tout-heimlich », s’il existe, ne serait-il pas là pour pallier l’unheimlich constant de nos petites vies mornes ?

    Enfin quant à l’intertextualité mercantile, je suis on ne peut plus d’accord avec toi.
    Je me souviens avoir arrêté au bout d’une vingtaine de page la lecture de « L’Elégance du Hérisson » (Muriel Barbery, Gallimard, 2006) qui décrivait tour à tour une concierge et une petite fille comme extrêmement cultivées, raffinées et intelligentes en ne faisant que citer Ozu ou Nietzsche sans jamais aller au-delà de leurs noms. J’ai eu l’impression que l’auteur essayait de me flatter en lançant au hasard des références qui faisaient chics et qui feraient forcément mouche puisque même moi qui n’ai jamais dépassé le premier chapitre d’Ainsi parlait Zarathoustra me sentirait égale à ces personnages décrits comme extraordinaires parce que ces noms résonneraient vaguement quelque part.
    Je m’exprime mal mais l’idée est telle que tu l’as décrite : « (…) lorsqu’on se rend compte que les référents intertextuels sont communs à tous, qu’ils sont trop vulgaires, trop gros, trop aisés à saisir… alors on ne sent pas/plus spécial (…) » J’en ai refermé le livre de frustration.

    Alors qu’une référence assez subtile pour : soit nous faire croire que peu vont la voir, soit si évidente qu’elle s’apparente à une citation, nous fait sentir de connivence avec l’auteur et nous caresse le poil dans le bon sens.

    Yes, I’m a unique snowflake,
    Bonsoir.

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